Aujourd’hui, tout de suite, là, au plus court. Ça va trop vite. Attendez-moi !

 

Pour Gérard Lévy, en hommage amical

Nous avons changé de mode de vie. On prend, on jette. L’addiction aux gadgets devient vitale. Le tout, tout de suite, ce totalitarisme de la pulsion est la revendication de la garde montante. Notre agenda marquera bientôt les quarts-d’heure. Il faut livrer dans les cinq minutes, résumer Guerre et Paix dans le même temps pour un entretien d’embauche organisé sur le mode speed dating .

 

Pas d’article. Pas de papier. C’est trop long. Le potin est de toujours, le tweet d’aujourd’hui. Ça bipe de partout. Les boîtes aux lettres se rouillent. Pas les BAL. On laisse tomber l’écrit pour aller à l’image, au flash.

 

On s’émeut instantanément de tout pour ne s’occuper durablement de rien. Nous sommes volages, inconstants, bavards, stressés, domptés par nos machines. On vit dans l’urgence. Ce qu’on fait s’efface aussitôt et a moins d’importance. Aujourd’hui remplace hier que la mémoire étouffe.  

 

On n’a plus le temps”, disent bien ceux qui en ont le plus. Plus le temps de lire Paul Fort, Balzac ou Flaubert, Tolstoï ou d’Ormesson. Trop long. Pas le temps. Trop compliqué. Le rétrécissement du temps rejette la complexité. C’est comme ça. 

 

Le présent est fugace, obsédant, limité à lui-même. Il absorbe le passé, annule les perspectives d’avenir. Sans épaisseur, sans projet de dépassement il s’installe dans la fascination de soi.

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