Pour mes amis Canovas, que j'embrasse

   Les juifs se comptent un petit million en Palestine, huit à neuf millions dans la diaspora, qui représente à elle seule près de 10% de l’empire romain. Les juifs de la diaspora, ce terme désignant l'ensemble de ceux qui ne sont pas retournés à Jérusalem après la libération décidée par le Perse Cyrus, ont un statut officiel, qui ne les écarte pas de la citoyenneté romaine ni des postes importants. Rome a jugé bon, en effet, d’accorder un statut propre à Israël, où le religieux, le politique et le juridique sont étroitement liés.

L’État civil des juifs est codifié. On devient en effet membre du peuple juif par la circoncision, l’origine israélite des ancêtres et l’observance de la Loi. Seul l’homme a un état civil. La femme, elle ne peut ni témoigner ni agir en justice, et n’hérite pas de son mari.

Au niveau de l’administration, les Romains ménagent la susceptibilité des juifs, assez soupe-au-lait, et préfèrent résider à Césarée en Samarie, au bord de la mer, plutôt qu’à Jérusalem, toujours agitée par des chamailleries. Car la Judée était un point chaud dans l’Empire romain, et elle le restera jusqu’au IIIe siècle.

Césarée, au bord de la mer, avait été fondée par Hérode qui l’avait nommée ainsi en l’honneur de César Auguste. Ses habitants sont divers, Grecs, Syriens ou Juifs. La tension entre ces groupes aboutit parfois à des massacres de juifs, que les Romains ne voient pas d’un mauvais œil. Hérode le Grand est un souverain habile, flatteur des Romains au point de dédier un temple à Auguste. C’est à Césarée que siègent les procurateurs de la province, et le quartier général des légions romaines. Le gouverneur monte à Jérusalem à l’occasion des grandes fêtes où les mouvements de foule sont encadrés par une garde d’un millier de soldats, pas plus, tandis que le gros des troupes réside en Syrie. Et si le procurateur se déplaçait à Jérusalem pour la Pâque et s'il y avait bien un détachement caserné dans l'Antonia, nom de la caserne militaire construite par Hérode le Grand à Jérusalem, c’est par la police du Grand Prêtre que Jésus fut appréhendé. Et l’impression prévaut que Pilate aurait préféré éviter cette histoire.

Côté finance, les juifs payent des impôts. Depuis Salomon. Ces impôts romains sont directs et indirects. La perception en est assurée par des fermiers généraux qui délèguent des percepteurs locaux, ces publicains qu'évoque le Nouveau Testament.

À ces impôts s’ajoute l’impôt du Temple, pour l’entretien du Temple et la rémunération du service des prêtres. Flavius Josèphe raconte que Pilate, qui fait tout pour irriter les juifs, non content d’introduire à Jérusalem des étendards impériaux, de faire suspendre aux murs du Temple des boucliers à l’effigie de l’empereur, voulut construire un aqueduc et en financer la construction en réquisitionnant les fonds déposés par les juifs dans le trésor du temps ! Tollé général ! Pilate est devenu si impopulaire que l’Empereur Caligula en vint à le rappeler à Rome et le condamner à choisir entre l’exil et le suicide.

Au niveau de la vie économique, les métiers, transmis de père en fils, concernent l’alimentation, la fabrication de vêtements (tisserands, teinturiers, etc.), l’équipement agricole, la poterie, les bijoux, les parfums pour la liturgie.

Le petit commerce pourvoit à l’approvisionnement des villes d’accès difficile. Les achats se paient avec de la monnaie romaine. Le troc est également pratiqué.

Le Temple enfin fait l’importance du commerce de Jérusalem. Beaucoup d’ouvriers y travaillent, à la construction, à l’entretien. Tous ces gens sont bien rétribués, et assistés par le trésor du Temple en cas de chômage.
 

Gérard LEROY, le 1er décembre 2012