Pour Jean-Marie Lebouc, avec mon affection

   Les chrétiens d’Orient sont victimes de razzias commises par l’État Islamique que la communauté internationale excommunie au vu de ses cruautés. Nous sommes ici confrontés à une tragédie qui marque notre nouveau siècle. 

La France a porté devant l’instance onusienne l’affaire des chrétiens et des minorités religieuses d’Orient. Nos dirigeants avaient été l’aiguillon de la communauté internationale lorsqu’ils ont réclamé une réflexion débouchant sur une réaction concertée contre le déploiement de la violence inouïe propagée par Daech.

Les minorités vivaient en paix à la faveur du nationalisme citoyen qui, dès la fin du dix-neuvième siècle, visait à souder ensemble des communautés diverses que le système ottoman des nations n’avait cessé de conforter dans leur singularité depuis le quinzième siècle. 

Quand, en 1948, la SDN créé l’État d’Israël, les États arabes du Proche-Orient sont plutôt portés par des systèmes autocratiques faisant le lit de la démocratie. Dans le même temps, l’Égypte, la Syrie et l’Irak, à la différence du Liban, reconnaissent la frange chrétienne à condition

que les chrétiens manifestent en retour leur fidélité politique et les gratifications sociales et clientélistes. Tutelle fragile, que les révolutions arabes trop occupées à batailler sur le champ confessionnel, ont éloignée de la démocratie. 

C’était sans compter avec l’insurrection d’une société marquée de plus en plus par le conflit sunnite/chiite. L’irruption des mouvements islamistes a profité du vide politique laissé par l’effondrement de l’État despote et l’influence d’acteurs divers régionaux. Les chrétiens, comme d’autres minorités, en font les frais.

Comment réagir aujourd’hui à la situation qui est faite aux Chrétiens d’Orient ? 

Il y a peu, quand les chrétiens d’Orient étaient dans la tourmente, les aides humanitaires, les démarches diplomatiques, la pression des défenseurs des droits de l’Homme, tout cela débouchait sur des réponses efficaces. L’éclatement du contexte géopolitique a annihilé les effets de ces acteurs. En Syrie ou en Irak, des régions entières obéissent à des commandements épars. Les guerres civiles et l’éclatement des territoires ont balayé le peu d’État qui subsistait.  

À la décomposition des pouvoirs s’ajoute le nettoyage ethnique et religieux. Les massacres et les persécutions placent les communautés chrétiennes, pour la première fois depuis le génocide arménien et les crimes commis contre les assyro-chaldéens, dans une situation de déréliction absolue. L’abandon de populations livrées à la vindicte obscurantiste tend à désagréger le tissu social et bouleverser la configuration pluraliste de peuples et de civilisations qui ont fait le Proche-Orient ancien et moderne. 

Que faire ? Conforter la présence des chrétiens dans l’Orient qu’ils habitent depuis des siècles, stopper l’hémorragie actuelle, leur assurer des moyens de se défendre, jeter le projet d’un plan de reconstruction des villes et villages dévastés, tel est le traitement de fond que préconisait Joseph Maïla dans le journal Le Monde, en mars dernier. Au Conseil de sécurité de l’ONU de prendre la chose en mains. Telle est la tâche essentielle qu’exige aujourd’hui la paix et la sécurité internationale.  

 

Gérard LEROY, le 29 juillet 2015