C’était signifier une considération des religions encore inédite quand, le 28 octobre 1965, les Pères de Vatican II signèrent le document “Nostra ætate”. Alors que l’initiative originale tendait à donner la position de l’Église catholique par rapport au judaïsme, les Pères conciliaires reconnaissent que les religions, dans leur ensemble, “s’efforcent de répondre aux questions concernant le sens de la vie et de la mort". Et toutes apportent une aide aux hommes en quête de vérité.

L’Église catholique, pour sa part, "ne rejette rien de ce qui est vrai et sain dans les religions, (...) elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose, cependant apportent souvent un rayon de la Vérité”. Ceci n'annule certes pas la mission de l'Église d’annoncer Jésus-Christ qui est “ la Voie, la Vérité et la Vie" (1), en lequel Dieu s'est réconcilié le monde (2).

Nous voilà invités au dialogue avec des peuples dont les croyances se fondent sur une foi inébranlable en l’existence d’un Être Suprême. Et si certaines religions traditionnelles entretiennent parfois des pratiques morales douteuses, discriminatoires, des rites dégradants, "on ne peut pas nier que ces peuples témoignent de la recherche de Dieu (...) (3)  ”. L’Église entend alors étendre aux grandes religions du monde ce que les Pères de l’Église disaient de la sagesse des nations en évoquant la philosophie grecque.

C’est dans cet esprit que furent réunis, le 27 octobre 1986, à Assise, les représentants d’une multitude de traditions religieuses. Quelques gestes chaleureux, quelques paroles échangées “pour que l’humanité déchirée redécouvre dans la joie l’unité de ses origines” (4)  ont suffi pour imprégner la rencontre d’un esprit particulier que le pape Jean-Paul II a appelé “l’esprit d’Assise”. Cette rencontre, si originale, si exemplaire, constitue dans l'histoire une unique exception.

Préparée par la déclaration Nostra ætate, par l’encyclique Ecclesiam suam invitant au dialogue, cette rencontre a marqué l'ouverture de l’Église au monde en état de pluralité religieuse, non pour s’y diluer et s’y perdre, mais pour l’accueillir, comprendre et partager la conviction confessée de l’unité du mystère du salut. En cela l'Église répondait à sa vocation.

Depuis Assise, des croyants de toutes traditions apprécient que leur propre religion soit considérée comme lieu d’une authentique expérience de Dieu. Cela ne peut déboucher que sur un dialogue fraternel. C’est l’esprit d’Assise qui l’anime.

 

Gérard LEROY
 

 

  • (1) Jn 14, 6.
  • (2) 2 Co 5, 18-19.
  • (3) Ce que déclarait le Cardinal Arinze dans une allocution prononcée à l’Institut pontifical de Bangalore le 31 janvier 1990. cf. Dennis Gira, Les religions, coll. Parcours, Centurion, 1991, pp. 26-50
  • (4) Cardinal Roger Etchegaray, Chemins de dialogue, Marseille 1996, n°7, p. 7