Voici le premier des trois extraits de la conférence donnée par l'abbé Georges RIEUX à la paroisse Saint Bonaventure de Narbonne, le 13 mars 2016, 4e dimanche de Carême. Nous remercions vivement l'abbé RIEUX de nous autoriser à publier ce texte dont la profondeur devrait toucher les lecteurs de Questions en partage. 

   Une miséricorde en forme sacramentelle

Pardon de Dieu et miséricorde semblent deux réalités reliées voire synonyme. Pourtant quand le catéchisme de l’Église catholique évoque les différents noms donnés à ce sacrement, il mentionne : conversion, pénitence, confession, pardon, réconciliation mais pas, explicitement, le sacrement de la miséricorde.

Qu’ajoute donc cette dénomination par rapport aux autres ? Si les vocables classiques mettent l’accent tantôt sur l’attitude du pénitent, tantôt sur l’amour parvenant de Dieu, la Miséricorde est comme la plateforme commune aux deux protagonistes, l’attribut partagé par le Créateur et sa créature, selon l’enseignement du Christ. “Le même attribut pour Dieu et pour nous”, rappelait Mgr Planet citant Gilbert Cesbron : “Heureux les miséricordieux, il leur sera fait miséricorde” (Mt 5, 7). Et notre évêque de poursuivre : “La cinquième Béatitude est aussi la seule qui promette à celui qui la vit activement de la vivre passivement dans le don de Dieu. Car il convient de ne pas se tromper : la phrase est à lire de droite à gauche. C’est Dieu qui a l’initiative est c’est notre expérience de sa miséricorde sur nos vies, de sa fidélité indéfectible sur la route cahoteuse de notre infidélité que nous pouvons tirer du fond de notre cœur, la capacité d’être miséricordieux.”

L’enseignement du Christ est clair : “Soyez miséricordieux comme votre Père des Cieux est miséricordieux.” (Lc 6, 36).

Dans le sacrement du Pardon se rejoignent en vérité l’aveu des fautes et leur absolution, la parole du pénitent et la parole divine, sur la base d’une commune miséricorde.

Si la figure extérieure de ce sacrement a connu des évolutions qui ressemblent à de révolutions, l’Église n’a jamais hésité à le proposer à ses fidèles, car il révèle un aspect décisif de la relation qui unit toute créature à son Créateur et Sauveur.

À Assise, en 2015, la pape François a invité les fidèles à retrouver le chemin du confessionnal. ‘Il y a des gens qui ont peur de s’approcher de la confession, en oubliant que, là, nous ne rencontrons pas un juge sévère, mais le Père immensément miséricordieux.”

En articulant ainsi justice et miséricorde, le pape nous introduit plus avant dans notre réflexion. La miséricorde divine n’est pas, en soi, opposée à la justice divine, mais elle l’inclut et la dépasse d’une façon que nous ne pourrons jamais élucider. Dieu est plus grand que ses dons. Quand le pardon retentit dans un prétoire, quand la victime tend la main à son bourreau qui a vieilli, peut-être pouvons-nous entrevoir cet inconcevable à l’aune des mesures humaines, comme une trace, dans l’histoire et ses fracas, d’un Pardon fondateur.

Abbé Georges RIEUX, le 23 mars 2016