Pour Cathy et Emmanuel Depernet, en hommage amical

   Malgré la désagrégation de l’Empire Romain, les tensions internes à l’Église, celle-ci parvient à les surmonter pendant le 1er millénaire. Mais les querelles liturgiques autant que théologiques s’aggravent, aboutissant au schisme de 1054. 

Les faits. La politique pontificale exaspère les Byzantins. Les relations se tendent. Le pape et le patriarche de Constantinople s’opposent sur la question dite du filioque. L’Esprit, pour les uns, procède “du Père et du Fils” (filioque procedit), tandis que les orientaux déclarent que “l’Esprit procède du Père par le Fils”. Ajoutez à cela les controverses sur la date de Pâques, le rituel des liturgies, la place des icônes dans le culte, l’obligation de célibat des prêtres, le port de la barbe par les prêtres, le pain de la messe, l’observance du jeûne le samedi, la consommation de laitage pendant la première semaine de Carême,  ... vous avez là tout l'inventaire de ce qu’on a appelé les “querelles byzantines”.

Au printemps 1054 le pape (Léon IX) envoie une ambassade auprès de l’Empereur byzantin pour demander une aide militaire contre les Normands qui menacent les Etats Pontificaux. Les trois légats du pape sont courtoisement accueillis par l’empereur Constantin Monomaque. 

En revanche,  le patriarche, qui leur avait battu froid, refuse de les

recevoir. Les légats sont si vexés que le dimanche suivant, 16 juillet 1054, alors que tout le monde s’est précipité à Sainte Sophie pour l’office, nos légats entrent dans le sanctuaire, déposent solennellement sur l’autel, face à une assemblée médusée, une bulle d’excommunication, contre l’évêque de Constantinople, Michel Cérulaire. Puis ils secouent la poussière de leurs sandales et déclarent “Que Dieu voit et juge”, avant de tourner les talons. La population byzantine les pouchassent. Ils déguerpissent. L’ évêque Michel Cérulaire, s’empresse de convoquer un concile et obtient l’excommunication des légats du pape.

La rupture est scellée. Après deux siècles de querelles, les dernières zizanies ne tenaient plus qu’à des divergences de pratiques, à des affaires de barbe, de graisse et de saindoux. Dans un même élan les autres patriarcats orientaux, Grecs, Serbes, Bulgares, Russes, et Roumains se regroupent derrière la bannière de l’orthodoxie. Il faudra attendre 1964 et la rencontre du pape Paul VI avec le patriarche Athénagoras pour que soient levés les anathèmes de Sainte-Sophie.

À Rome, fin XVIe siècle, on s’apprête à reconstruire et étendre la Basilique Saint-Pierre profanée. Pour financer les travaux on a recours aux indulgences payantes. Martin Luther s’en émeut, et condamne le commerce des indulgences dans ses 95 thèses de 1517. On assiste alors à la naissance du protestantisme. Le mouvement va se développer bien au-delà des frontières germaniques. Les guerres de religion éclatent; l’édit de Nantes reconnaît un statut aux protestants; les traités de Westphalie de 1648 consacrent la division de l’Europe chrétienne en États catholiques et États protestants. 

Pendant ce temps, la rupture entre le pape et le roi Henri VIII d’Angleterre entraîne la création de l’Église anglicane. 

Chemin faisant, l’histoire va souligner les différences entre les Églises orthodoxe, anglicane, réformée, et catholique. Le pluralisme se dégrade en oppositions réductrices et simplificatrices. L’orthodoxie met l’accent sur la communion d’Églises autonomes, dirigées par des patriarches, tandis que le catholicisme insiste sur l’organisation unifiée de l’Église sous l’autorité du pape. L’Église catholique parvient à défendre son indépendance, jusqu’à affirmer la supériorité du pouvoir spirituel sur les pouvoirs temporels.

La pierre de touche du catholicisme, en majorité occidental et latin, c’est l’obéissance au Pontife romain et au magistère.

Fin XVIe, les positions des réformés, l’intransigeance du concile de Trente, ont démarqué le catholicisme, lequel obéit au pape et aux évêques, célèbre 7 sacrements, légitime le culte des Saints et de la Vierge Marie

Par la suite le catholicisme se montre dogmatique, doctrinaire, appliquant la centralisation d’un appareil autoritaire clérical, tenté par le pouvoir et les compromissions politiques. On ne peut s’empêcher de rappeler ici ce que disait saint Jérôme au IVe siècle : Depuis les Apôtres jusqu’à notre époque, l’Église a grandi par les persécutions, a été couronnée du martyre. Et quand sont venus les empereurs chrétiens, sa puissance et sa richesse ont augmenté, mais ses vertus ont diminué.

 

Gérard LEROY, le 24 avril 2015