Nombreux sont les auditeurs, ayant apprécié la prière de Bruno Chenu diffusée le 28 mars sur RCF, qui m’ont fait part du désir de disposer du texte. Le voici ci-dessous, que tous peuvent ré-écouter grâce à l’onglet “radio” qui contient toutes les émissions diffusées sur RCF Aude.

   Je Te connais, Toi, Dieu, comme inconnu. Quand j'essaie de tisser les mots sur ce que je confesse de Toi, me voilà pris dans des tensions qui mettent à mal toute rigueur logique : Tu es proche et très lointain; Tu es extérieur, au-dessus, et intérieur, au-dedans; Tu es Tout-puissant et extraordinairement faible; Ta manière de parler approfondit le silence plutôt qu'elle ne le brise; Tu est tellement Père qu'il faut Te nommer aussi Mère; Ton unité indéfectible est celle d'une communion à trois; Ton efficacité est surtout de l'ordre de la gratuité.

Mais comme aucun discours ne peut combler le fossé qui existe entre Toi et nous, comme aucune lettre ne peut assurer la présence plénière de l'expéditeur, Tu as jugé bon de nous envoyer un facteur inattendu, Ton propre Fils. Et dès lors, notre connaissance de Toi a été toute chamboulée. "Personne n'a jamais vu Dieu : le Fils unique nous l'a dévoilé." Le Dieu avec l'homme est devenu le Dieu en l'homme, ou plutôt le Dieu comme homme. En Jésus tu as partagé la condition humaine à plein temps, tu as pris visage d'homme. Si bien que le prophète de Nazareth a pu oser cette parole étonnante : "Qui m'a vu a vu le Père." Et ce qui se donne à voir c'est un amour qui privilégie les petits et les exclus, qui remet debout les éclopés de l'espérance, qui pardonne à ceux qui traînent leur culpabilité. Ce qui se donne à voir, c'est une vie qui épouse le chemin de la justice, qui se fait abaissement pour que l'autre puisse grandir, qui accepte la souffrance et la mort pour que la vérité ne meure pas entre nos mains. Ce qui se donne à voir, c'est un visage que la mort n'a pas pu retenir dans ses rets et qui ressemble à tous les visages d'homme. 

 

Bruno Chenu († 2003), le 4 avril 2014