Pour Bertrand Ducoureau, en hommage amical

   Les fils d’Abraham s’entretuent au Proche-Orient, jusqu’à Hébron, où est mort le premier des patriarches, père des deux frères Isaac et Ismaël. C’est là qu’en 1994 un juif extrémiste avait tiré sur la foule dans le caveau des patriarches, tuant 29 Palestiniens. Un peu plus tard fut détruit ce qu’on croit être le tombeau de Joseph, à Naplouse. L'armée israélienne en assurait la protection avant qu’il soit saccagé à plusieurs reprises par les Palestiniens. Ce tombeau de Joseph on peut le visiter aussi à Hébron. Allez savoir lequel est l’authentique tombeau du fils de Jacob et Rachel quand la Bible vous dit que la dépouille de Joseph fut déposée en Égypte (Gn 50, 26) !

Sa mère, l’irrésistible Rachel, aurait une sépulture —c’est ce qui se dit— à Bethléem. On en est d’autant plus convaincu qu’on se bat pour ces tombeaux légendaires. Il y en aurait une centaine, c’est dire !

C’est encore autour de l’hypothétique tombeau de David à Jérusalem que viennent prier les juifs, les chrétiens et les musulmans.

À Jérusalem, on vient s’agglutiner au pied du mur que seuls les Français appellent le “Mur des Lamentations” tandis que tout le monde le désigne de Mur Occidental ou Mur du second Temple. Il appartient en effet au second Temple reconstruit avec l’autorisation de l’empereur perse Cyrus II. Sa construction s’est achevée en 516 av. J.-C. 

Mais ce Temple est en fait le troisième temple si l’on considère que s’intercale entre le premier Temple, celui de Salomon, et celui-ci, un petit Temple bâti par les Jérusalémites au retour d’exil à Babylone après 537 av. J.-C.

À Jérusalem, l’esplanade des Mosquées est régulièrement le lieu de provocations et l’objet de chamailleries. C’est de là que s’est “envolé” le Prophète pour un voyage céleste qu’il accomplit

en traversant sept cieux où il fit la rencontre de sept personnages vétéro et néo-testamentaires, dont saint Jean et Jésus. En écoutant le récit de ce voyage nocturne (cf Sourate 17), de nombreux Mecquois l’ont interprété comme un songe qu’aurait eu Mahomet, endormi près de l’enceinte de la Ka’ba.

Le culte des martyrs est toujours un sujet de conflits, parfois de violences, comme celles qui se déploient chaque année en Irak, à Karbala, nichée dans les palmeraies, grand centre de pèlerinage. C’est là que s’élève  le tombeau du second fils d’Ali, Hoseyn, petit-fils de Mahomet, mort martyr en 680. Saddam Hussein interdisait aux chiites d’y effectuer leur pélérinage. À Nadjaf est abrité le mausolée d’Ali, assassiné en 661 (sa sépulture est à Mazar e Charif, au nord de l’Afghanistan). Takrit est la ville natale de Saladin, qui a chassé les croisés de Jérusalem en 1187. On connaît les massacres causés lors des croisades qui se donnaient pour but de délivrer le tombeau du Christ, et pourquoi pas le cadavre du Christ lui-même, oubliant qu’il est ressuscité. Plutôt qu’au Saint-Sépulcre, qu’ils ne reconnaissent pas comme authentique, les protestants préfèrent vénérer la  “Garden’s tomb”. Allez savoir.

Jérusalem est l’endroit de prédilection pour les guéguerres de sacristies entre les quatorze confessions chrétiennes officielles, entre les ordres religieux rivaux, entre les vieilles nations qui usent de leurs droits conférés sous l’empire ottoman. La Terre Sainte (mot absent du Nouveau Testament) est “chaud-bouillante”. La résistance des quelques chrétiens qui restent sera-t-elle suffisante pour qu’elle subsiste Trois fois Sainte ? Allez savoir...

 

Gérard LEROY, le 3 juillet 2014