Madame La Ministre,

Un récent article du journal L’Express a dénoncé la position du Pr Joyeux sur la diffusion d’un vaccin, que n’a pas nommé le rédacteur du journal, et dont le Pr Joyeux entend souligner la dangerosité de l’adjuvant hydroxyde d’aluminium, probablement cancérigène, et du formaldéhyde dont il n’est pas sûr de l’innocuité. 

Renseigné par des spécialistes du médicament sur ce “super” vaccin Infanrix-hexa qui remplacerait le DTPolio qu’on ne trouve plus en officine et qui coûtait six fois moins cher, j’en viens à m’interroger sur cette nouveauté. Le rédacteur de L’Express, plutôt que de se pencher sur ses effets secondaires, préfère mettre en cause le Pr Joyeux dont il dit faussement qu’il s’opposerait à toute vaccination. J’ai reçu, comme beaucoup d’internautes, l’alerte du Pr Joyeux. Je n’y lis pas qu’il se dresse contre la vaccination, ce que prétend le rédacteur qui ne sait pas lire, mais contre la diffusion négligée de l'Infanrix-hexa, dont l’adjuvant aluminium, à cause de sa nocivité, aurait été exclu de certains produits cosmétiques. Il y aurait alors une faute professionnelle et morale de le conserver, de la part de la Ministre de ma Santé, de la mienne et de celle de mes enfants, conjuguée à celle des responsables du médicament.

Au lieu de cela, la presse nous abreuve de détails dont on se fout, sur l’appartenance du médecin à l’Opus Dei, sur ses convictions contre l’avortement etc. Mais qu’est-ce que ça vient faire ici, quand le public attend seulement de savoir si les adjuvants de ce vaccin ont des effets indésirables et pourquoi le DT Polio, jusqu’ici satisfaisant, est en rupture de stock depuis des mois ?

Faut-il croire le Professeur Joyeux, cancérologue-chirurgien, PU-PH, en regard de son titre ? Mais alors pourquoi ne croirait-on pas ses adversaires tout aussi distingués ? Nombre d’experts ont déjà étudié ces questions. Le Comité consultatif mondial de la sécurité vaccinale (GACVS) a conclu à l’innocuité de ces produits. D’autres, comme l’a rapporté la revue The Lancet, prétendent que l’hydroxyde d’aluminium causerait des douleurs musculaires invalidantes. Tandis que l’OMS déclare que “L’innocuité des adjuvants est un domaine important et négligé” 

À quoi sert donc le Haut Comité de la santé publique, qui pourtant remet régulièrement les recommandations à jour.

La vérité serait-elle proportionnelle à l’ampleur d’une pétition ? Les signataires, si nombreux soient-ils, ont-ils assez de compétence pour être considérés dans leur réclamation ? Et le législateur doit-il s’y soumettre ? Ce flou engendre un malaise lié à la perte de confiance du public.

Les vaccinations ont permis d’éradiquer la variole et presque totalement la poliomyélite, et donc épargné bien des vies humaines. Les questions, Madame la Ministre, surgissent : premièrement, peut-on refuser le plus petit risque pour les siens en sachant qu’on fragilise, ipso facto, des populations entières que des épidémies pourraient toucher ; deuxièmement, l’industrie pharmaceutique a-t-elle réagi aux soupçons qui sont portés sur ses agissements ? A-t-elle sciemment encouragé la pénurie du DT Polio ? Des précédents récents, qui traduisent la déperdition de la morale, légitiment ces questions. La crédibilité des acteurs est de plus en plus écornée. La défiance du public ne pourra être balayée d’un revers de main par une procédure disciplinaire et une injonction à se faire vacciner. 

Le public est-il à ce point ignorant pour mériter un tel mépris en étant maintenu à l‘écart du débat ? N’est-il qu’une proie manipulable des responsables politiques et des journalistes ? Sans un dialogue des autorités avec les professionnels de santé et le public, il n’y aura pas de progrès dans la confiance envers les vaccins. Expliquez-vous, expliquez-nous, s’il vous plaît, en toute sérénité, à l’écart des chamailleries politiques .

Veuillez croire, Madame La Ministre, en ma respectueuse considération.

 

Gérard LEROY, le 17 juillet 2015