Pour Sophie Guerlin, en hommage amical

   Jusqu'à Vatican II, le "pastoral" faisait l'objet de considérations de type plutôt piétiste, ou de rêverie sentimentale, ou encore du type autoritaire, où le pasteur commande et les moutons obéissent. Par ailleurs, le "pastoral" était opposé au "missionnaire" : au pastoral, la garde du troupeau ; au missionnaire, la fondation de l'Eglise. Dans le même temps, le sacerdotal avait pris la relève du pastoral, et naturellement se produit une "inflation sacerdotale". 

Dans le Nouveau Testament, le thème sacerdotal est très peu présent. Ce n'est que tardivement que Jésus se voit attribuer le sacerdoce. Retenons cependant que l'image du sacerdoce, à cause de son importance dans les religions païennes, avait de quoi être suspecte aux yeux des premiers chrétiens. Les apôtres ne s'attribuaient donc pas un titre qui les auraient assimilés aux religions traditionnelles.

Cependant, au IVe siècle, les ministres qu’évoque le Nouveau Testament sont appelés "sacerdotes", en plus de  "peuple de baptisés".

Quant vint le Moyen-âge, le ministère de la Nouvelle Alliance est appelé « Ministère sacerdotal ». En vérité, c'est à propos du baptême qu'il faut parler de consécration sacerdotale. Le chrétien est consacré pour entrer dans le peuple des baptisés (le peuple sacerdotal), d’autant qu’on parle alors indifféremment d'ordination pastorale, presbytérale, ou épiscopale.

Après le Concile de Trente (1542), on assiste au développement du thème sacerdotal dans les séminaires français. Autant dire que « sacerdoce », « sacrifice » et « culte » sont liés. Le prêtre devient essentiellement l'homme du culte, d'où l’ « inflation cultuelle » de cette époque. En fait, il convient moins de parler de ministère sacerdotal que de ministère pastoral. Les ordonnés ne sont pas seulement des « sacerdotes », ils reçoivent la charge de tout l'agir de l’Eglise.

Vatican II rétablit le statut du sacerdotal en regard du pastoral. Double réévaluation : le sacerdotal est d'abord attribué au Peuple avant de l'être aux ministres ; d'autre part, le sacerdotal n'est qu'une des fonctions du ministre, qui est pasteur selon l'Evangile.

Les Évêques sont des pasteurs dès lors qu’ils sont chargés du gouvernement de l’Église,  « sacerdoces » du culte sacré. Ils sont en charge de l'accomplissement du projet de Dieu selon l’Evangile.

On est passé du sacerdotal connotant à la fois le prophétique, le  liturgique, le  pastoral, au pastoral connotant tout à la fois le prophétique, le sacerdotal et le gouvernement de l’Église.

 

Gérard LEROY, le 5 avril 2019