Pour Jean-Louis Machuron, en hommage amical
Aujourd’hui l’on sait que l’Arménie et l’Azerbaïdjan se disputent le Haut-Karabakh, territoire montagneux, grand comme le département de la Drôme, enclavé dans la République d’Azerbaïdjan. Le Haut-Karabakh est azerbaïdjanais, mais sous contrôle des forces militaires arméniennes. Cette province est peuplée de 150 000 habitants, majoritairement arméniens.
En 1920, l’Azerbaïdjan et l’Arménie entraient dans l’URSS. Staline décide alors du rattachement du Haut-Karabakh, peuplé en majorité d’Arméniens chrétiens, à l’Azerbaïdjan, à majorité musulmane chi’ite.
En 1988, à la faveur de la perestroïka, le Karabakh vote son rattachement à l’Arménie. Dès lors les escarmouches se multiplient, les Arméniens d’Azerbaïdjan rejoignent l’Arménie tandis que les Azéris d’Arménie se réfugient en Azerbaïdjan. En 1991, l’Azerbaïdjan déclare son indépendance. L’Arménie, séparée de l’Azerbaïdjan, proclame la république du Haut-Karabakh indépendante, ce que ne reconnait pas l’ONU.
Des combats s’engagent alors entre Arméniens et Azéris : 30 000 morts. En 1994, un cessez-le-feu met fin aux violences, mais en septembre 2020, ces pays décident de la mobilisation générale et instaurent la loi martiale. Le Kremlin se positionne en arbitre dans la région, tandis que le Président turc a annoncé qu’il soutiendrait l’Azerbaïdjan.
Un peu d’histoire
Les sources de la présence arménienne en Mésopotamie remontent à l’antiquité. Au premier siècle avant Jésus-Christ, l’Adiabène, région dont Erbil fut la capitale, était partie intégrante du royaume d'Arménie. Au tout début du quatrième siècle l’Adiabène était encore la marche méridionale de l’Arménie, devenue le tout premier royaume chrétien de l’histoire, en l'an 301, avant même l’édit de Milan décidé par Constantin.
Ce n’est qu’au XVIIe siècle que de nouvelles communautés arméniennes s’implantèrent en Mésopotamie irakienne, après que le Perse Shah Abbas Ier ait conquis Bagdad en 1623. Celui-ci, cinquième Shah safavide de l’Iran, avait mis en place un État centralisé à Ispahan, après avoir repoussé les Uzbeks et chassé, en 1604, les Ottomans.
La reprise de Bagdad en 1638 par les Ottomans, avec l'aide de soldats arméniens ottomans, ouvrit un nouvel épisode de l'implantation arménienne à Bagdad. Au début du XIXe siècle les Arméniens étaient près de 90000 en Irak.
La défense du vilayet (1) de Van (au nord de Mossoul) par les Arméniens, en 1915, déclencha les massacres de l’Empire ottoman contre la population arménienne. Le génocide des Arméniens provoqua une non moins dramatique migration des Arméniens vers la Mésopotamie irakienne, déportés des provinces orientales de l'empire venant du Nord le long du Tigre, de l'Ouest le long de la ligne de chemin de fer reliant Alep à Bagdad.
Après cinq semaines de combats acharnés, les troupes russes entrèrent dans la ville mettant en fuite les troupes turques. On découvrit alors les cadavres de quelques 55 000 civils arméniens massacrés.
Les Arméniens qui avaient réussi à fuir parvinrent dans certaines zones de relégation jusqu'à Mossoul et Kirkourk.
Très majoritairement membres de l'Église apostolique arménienne, les Arméniens d’Irak comptent également nombre de catholiques ainsi qu'une petite communauté évangélique. Avant 2003, il y avait plus de 25000 Arméniens en Irak. En 2019 ils sont 10 000 à 13 000 à y vivre encore.
Gérard Leroy, le 4 octobre 2020
(1) un vilayet est une administration dépendant directement du Sultan, instituée vers les années 1840 par l’empire ottoman, visant à administrer chaque province de l’empire.