Pour Dominique Leviel, en hommage amical
La ville de Colosse est en Phrygie (en Turquie actuelle), à 200km d’Éphèse et pas très loin de Laodicée. Cette petite bourgade qui fut une cité importante dans l’antiquité est aujourd’hui en ruines.
À l’époque de Paul les gens de Colosse (cf. Col 2,1) sont d’origine païenne. Ils n’ont jamais vu Paul qui n’y a d’ailleurs jamais mis les pieds. Et l’on ignore encore à quelle période précise la communauté chrétienne a vu le jour, fondée par un certain Épaphras, lui-même Colossien, et qui s’apprête à devenir évêque de Laodicée. Paul a désigné quelques-uns de ses disciples pour évangéliser les cités dont ils sont originaires. Il envoie un certain Tychique (qui sera le colporteur de la lettre), accompagné d’Onésime à Colosse. Cette troisième mission de Paul est relatée dans le Livre des Actes (Ac 18, 23 — 21, 17). Pendant ce temps Paul séjourne à Éphèse. Ce séjour d’environ deux ans est relaté dans la première lettre aux Corinthiens, et dans l’épitre aux Philippiens. De là il rejoint la Macédoine pour un court séjour (2 Co et Galates) avant de regagner Corinthe.
L'auteur de l’épitre procède souvent par allusions mais laisse entrevoir des éclairages sur les hérésies qui se propagent à Colosse (Col 2,6-23). Le paganisme de ces gens est coloré. On le rencontre dans le déroulement des fêtes annuelles, dans la loi, les tabous alimentaires, la perception des anges, l’ascétisme excessif. L’influence du judaïsme de la Diaspora est à noter, qui s’exerce aussi sur le syncrétisme ambiant en accueillant aussi bien les idées philosophiques hellénistes que les aspirations religieuses orientales. Car la Phrygie est une terre de bouillonnement religieux, où se développe la gnose depuis le IIe siècle, dans un climat de dégénérescence conséquent aux aspirations des hommes à se débarrasser de la matière, s’en libérer au point de friser le manichéisme. Un tel délaissement de la matière aboutit à l’abolition du mariage. L’ascèse, complètement dégagée de la réalité corporelle, l’est aussi de la réalité charnelle.
Dans l’épitre aux Colossiens Paul accentue la valeur donnée à ces points contestés par la gnose jusqu’à les oublier. Les erreurs, pour Paul, menacent la vérité chrétienne. Or, « Le Christ est au-dessus de tout ». L’hymne colossien est précisément la pré-éminence du Christ. « Le Christ, dit Paul, c’est la plénitude » (Col 1, 19).
Cette épitre est une contemplation du mystère du Christ dans sa transcendance (1,15-23), révélé et annoncé (1, 23-25). Elle surgit après avoir réfuté, brisé les hérésies, exhortant au passage les conseils pour la vie morale et sociale.
Gérard Leroy, le 28 février 2025