Pour Joseph Maïla, en hommage amical

   En l'an 445 un roi perse massacra 12000 chrétiens à Kirkouk. Après sa mort les chrétiens de Kirkouk, érigèrent un grand martyrion et instituèrent une célébration commémorative.

Cette église chaldéenne, un peu au sud d’Erbil, doit son nom à l'officier perse qui dirigea le massacre. Repenti et converti au christianisme Tahmazgerd réclama d'être exécuté sur le lieu même où il avait sacrifié les chrétiens, devenant lui aussi martyr de la foi. L’édifice doit aussi son surnom d'église rouge au sang des victimes sacrifiées, à moins que ce ne soit en raison de la géologie de cette colline et de la couleur rouge de sa terre.

L’église de Tahmazgerd fut en grande partie détruite en 1918 pendant la première guerre mondiale au cours du conflit qui opposa les Turcs ottomans aux Britanniques. Une restauration eut lieu en 1923 mais l'édifice n'est plus du tout visible aujourd’hui. Le dôme de l'ancienne église est en effet recouvert par des sépultures. Une nécropole fut construite en 1933. Elle abrite de nombreuses tombes de notables. En 1983 une église-halle d’une seule nef fut construite en avant de cette nécropole.

Le culte des martyrs demeure encore de nos jours un ferment essentiel du christianisme mésopotamien. Le 25 septembre de chaque année, les chrétiens de Kirkouk font mémoire de leurs martyrs.

À Ankawa, cité chrétienne de la Métropole d’Erbil, se situe l'église Saint Georges. Autrefois Ankawa était un petit village chrétien à l'extérieur de la porte nord de la citadelle d’Erbil.

Ancienne capitale d’un royaume assyrien, Erbil est connu pour avoir été un des foyers juifs de Mésopotamie où s'implanta le christianisme dès le premier siècle grâce aux apôtres Thadée et Thomas. Avant les conquêtes musulmanes au septième siècle. En ce début du XXIe siècle on y a accueilli les dizaines de milliers de chrétiens venus de Bagdad, de Mossoul et de la plaine de Ninive en raison des persécutions antichrétiennes commises par des groupes plus mafieux qu’islamiques.

L'église Saint Georges est implantée au nord, face à un tell d'époque assyrienne où les fouilles archéologiques ont permis d'identifier les fondations d'une très ancienne église déjà dédiée à Saint-Georges. L'église Saint Georges est incontestablement l'une des plus anciennes de la région d’Erbil. En 1995 des tablettes avec des inscriptions en langue syriaque ont été découvertes au cours de fouilles réalisées dans le martyrion.

Plusieurs fois reconstruit, l'actuel édifice daterait du XIXe siècle. Le jardin près de l'église était auparavant un cimetière. De nombreuses pierres tombales qui s’y trouvaient ont été encastrées, dans le mur de l’église, à l'occasion de travaux de rénovation et de réaménagement des espaces.

Les Chaldéens aujourd'hui

L'église chaldéenne catholique est née au XVIe siècle d'un schisme au sein de l'église de l’Orient. En 1552 plusieurs évêques établis dans le nord de l’Irak, au sud de la Turquie et au nord de l'Iran (au XVIe siècle l'empire ottoman et la Perse) contestèrent la succession héréditaire du catholicos assyrien ; ils élurent à Mossoul un autre patriarche, supérieur du monastère de d’Alqosh. Celui-ci se rendit à Rome pour y faire profession de foi catholique. En avril 1553 le pape Jules III le consacra patriarche de l'église chaldéenne catholique.

Incontestablement majoritaires parmi les 1 200 000 chrétiens irakiens estimés avant la première guerre du Golfe en 1991, les chaldéens se comptaient 750 000 au dernier recensement en 1987, contre 30000 Assyriens. En 2019 il resterait bien moins de 400000 chrétiens chaldéens en Irak, répartis entre Baghdad, le Kurdistan, la plaine de Ninive et Bassora.

Aujourd'hui l'église chaldéenne est constituée d'une importante diaspora éparpillée un peu partout, aux États-Unis, en Europe, en Australie, au Canada, en Nouvelle-Zélande, en Russie (à Moscou, Rostov-sur-le-Don), en Ukraine, en Georgie (Tbilissi), et en Arménie (Erevan).

 

Gérard Leroy, le 26 juin 2020

(1) cet article est nourri des informations recueillies lors de l'expo présentée à l'Université Catholique de Lyon, en février 2020.