Pour Madeleine, ma petite-fille que j’embrasse fort

    D’abord je t’invite à comprendre que le dialogue c’est pas la discut’. C’est même le contraire. Dans une discut’ ton interlocuteur cherche à t’imposer ce qu’il croit. Plus il se donne des raisons de croire et plus il croit qu’il a raison de croire. Imagine que toi tu te comportes pareillement et tous les deux vous vous quitterez en vous tournant le dos. Prisonniers dans vos certitudes, scotchés à vos préjugés.

La question nous amène à réfléchir.

Derrière les mots se profile ce qu’ils signifient. Sans cela on en reste à la discut’ qui n’a pas d’issue.

Le dialogue c’est autre chose. On ne s’invective pas. On ne se déteste pas. On ne manipule pas. On cesse même de s’indigner. Laisse béton la séduction, argumente ta conviction.

Commence par t’étonner. La faculté d’étonnement, est une source sûre du dialogue. Quand tu demandes « pourquoi ? » ou « c’est quoi ? » en face de ce que tu découvres, tu exprimes un étonnement. Émerveille-toi. Rien n’est acquis.

Interroge : « qu’est-ce que ça veut dire ? » (qu’est-ce que ça signifie) ; « à quoi ça sert ? ». Commence à questionner. À te questionner. Qu’est-ce qui est vrai ? Qu’est-ce qui est bien ? Qu’est-ce que c’est ?

Continue en remettant en question tes présupposés. Ce que tu sais, ce que tu crois, d’où ça vient ? As-tu vérifié que c’est vrai ? En partie ? Entièrement ? L’ennemi de la vérité n’est pas le doute mais la certitude, pure et simple, péremptoire, assénée comme vérité. Il s’agit donc de reconsidérer ses propres thèses comme des hypothèses, d’interroger les présupposés d’une affirmation.

Il s’agit ensuite de définir les notions utilisées, de clarifier ce dont on parle.

Tout cela te mènera, par le détour d’une démolition du légo, par une dé-construction des affirmations prononcées, à une argumentation.

Comme un train peut en cacher un autre, retiens qu’une parole peut être dite selon l’humeur du moment, la psychologie, des buts cachés.

S’établira alors un dialogue vrai quand ta conscience des choses et celle de ton interlocuteur visent pareillement la recherche d’une vérité. Quand lui et toi cherchent ce qui est vrai. Ce qui est vrai peut aussi bien se rapporter à une pensée profonde que relever d’un horaire de train. Les désaccords s’effacent et s’entendent alors pour connaître l’heure réelle du départ du train, indispensable si on ne veut pas le rater ! La vérité aura surgi d’un échange. D’un dialogue vrai.

Pour qu’un dialogue soit constructif, il est nécessaire d’instaurer le respect mutuel des gens qui s’expliquent et des idées. Tout cela implique l’humilité, la coopération, la reconnaissance de la diversité des gens en présence. La discussion connote plutôt la guerre ; le dialogue implique la subordination à une vérité indépendante de soi.

 

Grand papa, le 1 octobre 2021