Pour Pierre et Apolline

   Tout commence à Damas. Par une discorde, la fitna, qui oppose deux camps qui prétendent au califat après la mort du Prophète Mahomet en 632. Les partisans d’Ali, gendre et cousin de Mahomet, les shiat’Ali, soit les Chi’ites, doivent abandonner le pouvoir à la dynastie importante des Omeyyades.   

Les Omeyyades sont de riches marchands, réputés, doués d’un certain sens de l’État. Leur quatrième calife, Moawiyya, règne de 661 à 680. Il fonde Kairouan en Tunisie, en 670, et pousse ses troupes jusqu’en Asie centrale. Il meurt en 680. Abd-Al-Malik accède au califat en 685. C’est lui qui impose l’arabe comme langue officielle et fait frapper une monnaie arabe (sans effigie). C’est lui encore qui lance la construction d’édifices comme la mosquée Al-Aqsa et le dôme du Rocher à Jérusalem. Son fils, Al-Walid, édifie autour de 710 la mosquée des Omeyyades de Damas.

Le clan rival obéit à un chef dynastique, Abu al-Abbas, oncle de Mahomet. Ce clan est celui des Abbassides. Ces gens sont avides du pouvoir que détiennent les Omeyyades depuis plus d’un siècle.   

Les Abbassides invitent un jour les Omeyyades à un repas de réconciliation. Tous les Omeyyades sont assassinés lors de ce banquet par les Abbassides. Sauf Abd-Al-Rahman ibn Hisham qui s’enfuit sain et sauf.

Abd-Al-Rahman, l’un des rares survivants du massacre perpétré par les Abbassides débarque en Espagne, en 750. Il écarte le dernier gouverneur aidé des Syriens, des Berbères, et se fait proclamer Emir d'al Andalus dans la Grande Mosquée de Cordoue, en 756. Le premier emir Omeyyade indépendant de l’émirat fondé en 756 à Cordoue règnera trente ans avant de mourir en 788. Il réussira à réunifier les différents groupes ethniques de l'Espagne : Arabes Yéménites et Qaïsites, Berbères et Arabes, Espagnols convertis (Muwaleds) et Espagnols chrétiens de culture arabe (Mozarabes).

En dépit de nombreuses révoltes, d’insurrections berbères, et ayant à déjouer les tentatives des membres de sa propre famille pour le renverser, Abderrahman sera parvenu à jeter les bases politiques et administratives de son émirat. L'Espagne musulmane se trouve alors promue au rang de principauté, indépendante et souveraine. Cordoue commence dès lors  à faire vraiment figure de capitale musulmane quand Abd-Al-Rahman meurt, en 788, à moins de soixante ans. Il transmet à son successeur un royaume que ni les offensives chrétiennes ni les nombreuses séditions arabes et berbères n'avaient entamé.

Cordoue peut s’enorgueillir encore du prestige de certains de ses enfants. C’est là en effet que sont nés Averroès, Maïmonide, Manolète et autres célébrités. C’est encore à Cordoue qu’est né Sénèque, contemporain de Jésus de Nazareth, précepteur de Néron. Beaucoup de grandes dames assistaient aux cours de Sénèque, dont la délicieuse sœur de Caligula, Julia Lucilla, qui eut un jour besoin d’une explication particulière, ce qui avait rendu fou de jalousie Caligula qui exila Sénèque en Corse. Huit ans !

Le jour même de la mort de Claude, Sénèque revenu de Corse fut nommé premier secrétaire d’État, avec les fonctions de premier ministre de l’empereur Néron. Sénèque, qui tout au long de sa vie fut irréprochable, pas même soupçonné d’adultère, constituait le symbole vivant de la vertu.

Cordoue était alors une province romaine abritant le temple de Janus. Christianisée peu après le règne de Constantin (IVe s) elle a été marquée par la monumentale basilique chrétienne wisigothique. Une seconde et très courte période catholique s’inscrivit au beau milieu de 1146, lors d’une brève reconquête de la ville par le roi Alphonse VII. Au siècle suivant fut érigée la cathédrale catholique favorisée par la Reconquista, chrétienne, menée par le roi Ferdinand III de Castille en 1236. Depuis cette date, la cathédrale est le siège du diocèse espagnol de Cordoue.

 

Gérard Leroy, le 14 février 2025