Mère Méditerranée de civilisations Gérard Leroy - L'Harmattan 2024 -

   L'œil noir d'une échauguette maltaise scrutant le grand large d'une mer - mère de civilisations plurimillénaires (hypallage salée ...) - est celui que l'auteur jette pour nous sur l'histoire tourmentée des peuples bordant cet immense bassin intercontinental.

Dès le 2e chapitre, Gérard Leroy annonce son projet qui consiste à nous aider à découvrir les sources de notre propre histoire à travers l'étude d'événements survenus entre le XIIe siècle avant J.C. et l'avènement de l'islam : « C'est au carrefour de ces civilisations qu'il faut penser la Bible, qui rassemble, brasse des peuples, fait parler des langues. Le récit biblique rapporte la singulière expérience historique de ces métissages qui vont polychromer la toile de fond de civilisations. »

De siècle en siècle, Gérard Leroy nous propose une synthèse exceptionnellement dense des tribulations de ces peuples de la mare nostrum à travers l'étude historique et géographique,
bien sûr, mais aussi politique, culturelle, agricole également, mais surtout théologique, citant alors Aristote dans Métaphysique : " Ainsi les sciences théorétiques (mathématique, physique,
théologie- ndlr) sont les plus hautes des sciences, et la théologie est la plus haute des sciences théorétiques ."

Le fil conducteur restera cependant la philosophie définie ainsi dès la fin du IVe siècle avant J.C. : « La philosophie prend néanmoins de plus en plus d'importance. On la vit dorénavant comme une

thérapeutique, au service de la guérison des maladies de l'âme. C'est un art de vivre et de mourir. Le philosophe s'avère à la fois prophète et psychanalyste."

Et Gérard Leroy de nous instruire sur la vie et l'œuvre des plus grands artisans ayant assemblé cette mosaïque méditerranéenne (essentiellement empereurs et philosophes) avec - pour une meilleure compréhension - quelques petites incursions dans le siècle de saint Louis avec Thomas d’Aquin ou Bonaventure, et même quelques citations de philosophes contemporains, avec des temps forts comme les conciles de Nicée (325) et de Constantinople (381) illustrant l'argument théologique d'Athanase : « La Trinité immanente est la vie, à la fois de communion et de communication entre le Père et le Fils auxquels le concile de Constantinople reconnaît(ra, huit ans après sa mort -ndlr) la présence jointe de l'Esprit-Saint en eux et entre eux. »

« Athanase est préoccupé - poursuit-il - par le partenariat intellectuel que permet une alliance entre entre la foi chrétienne et la philosophie. De sorte que l'Écriture s'offre à être comprise et par la théologie et par la philosophie. » Après Athanase et Ambroise, Augustin d'Hippone remembre le vétuste cadastre philosophique : « Avec Christ la lumière est venue sur le monde. Il n'y a plus à chercher ailleurs que dans la vraie religion la vraie philosophie ! »

Cependant « la christianisation n'est pas un long fleuve tranquille » et trois siècles plus tard, naîtra, en 570, le prophète Mahomet qui, à l'âge de quarante ans, aura une révélation le conduisant à « déclarer la la guerre aux «associateurs» qui identifient le Dieu-père avec le Fils ». Le Coran devient « la religion, la législation, la pensée, le paradigme de la langue arabe ... et du VIIIe au XIIIe siècles, l'empire arabo- musulman sera supérieur à tous les peuples européens et chrétiens en botanique, mathématiques, philosophie, médecine, astronomie ... et demeurera (...) la plus brillante civilisation du Moyen-Âge. »

« La Méditerranée est aujourd'hui appelée à répondre de l'espérance dont elle est le berceau » : alors, en Pèlerins d'Espérance que nous sommes précisément et à l'aube de 2025, année Jubilaire, penchons- nous sur ce "berceau" et répondons à la prière de Gérard Leroy qui nous aura enrichis et régalés ici de ses si doctes enseignements émaillés d'un humour subtil et surtout d'une Foi inébranlable.

Jean-Pierre Janier