Pour Gabriel Setruk, Pierre Guigui, Bernard Kouchner, Nathalie et David Moatti, Serge Misrai, Marianne Rode, Christophe Lévy, Béatrice Weill, Didier Sribny, Agnès Buzyn, Ghaleb Bencheikh…
L’attaque du Hamas a surpris. L’audace et l’ampleur dévastatrice de l’opération barbare favorisée par la totale incurie des renseignements militaires et civils ont causé le désarroi des forces de défense israélienne.
Cette attaque était prévisible. Prévisible parce que plusieurs voix se sont élevées récemment, arabes, certes, mais aussi juives, d’Israël ou d’ailleurs, pour dénoncer l’apartheid dont souffrent les Palestiniens. Le mot est fort. Et juste. Cet apartheid est en place depuis longtemps.
À l’affolement se sont succédé des scènes de cauchemar. Des combattants du Hamas juchés sur des pick-up, munis de fusils automatiques, ont franchi une infranchissable barrière ultra protégée par des senseurs technologiques dernier cri. Des terroristes armés allaient librement vers des villages et des kibboutz pour les assiéger. Des hommes, des femmes et des enfants en détresse sont exécutés à bout portant, d’autres, par dizaines, sont pris en otages et emmenés de l’autre côté de la frontière, où les réseaux sociaux les exhibent, nus, battus, insultés. La radio répercute les appels à l’aide désespérés. Lorsque l’armée arrive enfin, des combats acharnés s’engagent, le jour, la nuit, un jour encore… Quant cessera ce carnage ?
Cette opération menée par le Hamas, horrible, ne doit pas être déconnectée de l’histoire vécue à la fois par les Israéliens et par les Palestiniens depuis 1948.
D’abord, il est sage de distinguer le Hamas et les Gazaouis, dont tous n’approuvent pas la violence de cette mouvance héritée de la confrérie des Frères Musulmans fondée en 1928 par l’Égyptien Hassan al-Banna. Son successeur, l’Égyptien Sayyid Qutb, durcira le ton en justifiant le recours à la violence contre les valeurs occidentales qu’il considère comme nuisibles et en prêchant la « lutte contre les Juifs ». C’est à lui que se réfèrent les chefs terroristes.
La violence abjecte qui s’exerce aujourd’hui à l’égard des Israéliens, relève d’une haine effrénée,
semée et développée par la doctrine des Frères Musulmans, favorisée par la colonisation, l’implantation forcenée de buildings, au mépris de tous. Observons seulement les territoires palestiniens de Cisjordanie qui se présentent comme un gruyère. Il n’y a, en effet, aucune continuité géographique entre les villages à cause du tracé de ces routes qui empêchent les bourgs palestiniens d’être reliés entre eux.
Comment expliquer l’impéritie de cette armée israélienne réputée puissante ? Comment des services secrets aussi performants, capables de localiser un terroriste planqué dans un grenier au troisième étage à gauche ? Comment ont-ils été incapables de voir venir l’assaut ? Ces négligences, ce laxisme, l’assurance d’invincibilité, Netanyahou va devoir en répondre.
Portons notre regard en amont. Benyamin Netanyahou a fermé les yeux sur les Palestiniens comme s’ils avaient disparus non seulement du paysage politique mais de surcroît comme humains. Elle débouche sur l’engrenage dans lequel on se trouve aujourd’hui. Cette situation ne vient pas de nulle part. Elie Barnavi, ancien ambassadeur d’Israël en France l’explique ainsi : « L’attaque du Hamas résulte de la conjonction d’une organisation islamiste fanatique et d’une politique israélienne imbécile ».
Il est urgent et nécessaire de considérer la dénégation des droits fondamentaux du peuple palestinien, notamment son indépendance et sa souveraineté. N’est-ce pas la cause principale de la tension permanente israélo-palestinienne ?
Pour sortir de cet engrenage il va falloir s’asseoir autour d’une table et se demander quel est, ou quels sont, les moyens à partir desquels on peut sortir de cet égout sans fond, et envisager de vivre sereinement. Côte à côte.
Les juifs existent. Les Palestiniens aussi. La paix dans cette région ne peut pas s’envisager sans prendre en considération les deux communautés, en attribuant à chacune un territoire distinct, et non plus éparpillé tel un puzzle comme aujourd’hui. Un retour sans conditions préalables à la table des négociations doit mettre en œuvre le principe de deux Etats et permettre la défense des intérêts et du peuple palestinien et du peuple israélien. Rejoignent cette perspective Anne Sinclair, Agnès Levallois, spécialiste du Moyen-Orient, Raphaël Glucksmann, et d’autres. Il n’y a bien que Mathilde Payot, dont l’anti-sionisme est le cheval de Troie de l’antisémitisme, pour éprouver quelque difficulté à admettre que le Hamas est terroriste.
Gérard Leroy, le 12 octobre 2023