Pour Christophe Ismaël, Taiëb, Ghaleb, Rachid, en hommage amical
Depuis la création des Frères musulmans, les radicaux ne considèrent l’Islam que comme un ordre politico-religieux, voulu par Dieu, pour le monde entier. Tandis que des régimes musulmans tentent de cheminer vers plus de démocratie, les islamistes, eux, ambitionnent d’islamiser la modernité.
À partir de 1980, l’islamisme s’est dotée d’un bras armé, infiltrant les institutions, mettant en place des centres de formation et d’entraînement. Ces camps attirent des jeunes déracinés, sans attaches, paumés, qui apprennent à lutter contre l’ordre mondial. Les analyses sociologiques montrent que le djihadisme séduit ces jeunes parce qu’ils manquent de repères, qu’ils endurent l’exclusion, à la fois sociale et culturelle, et qu’ils souffrent d’un vrai malaise identitaire. Voilà qui les rend plus perméables aux discours radicaux. En devenant djihadistes ils passent d’une stigmatisation subie à une dissidence choisie.
Ces jeunes, qui ne connaissent pas grand-chose à l’islam, en ont une vision sommaire et guerrière.
Leur vision du monde est manichéenne, séparant les purs et les impurs, les croyants et les mécréants. Ils recherchent éperdument une visibilité, une certaine forme de notoriété. On peut les comparer aux born again américains, car ils font preuve d’un zèle décuplé, comme s’ils éprouvaient le besoin d’authentifier leur foi. Ces loups solitaires, borderline, opèrent seuls, mettant leur violence au service d’une cause, plus pure et plus valorisante à leurs yeux que la délinquance. Mais leur terrorisme reste pulsionnel, isolé. L’heure est au terrorisme low-cost !
Leur combat s’étend à l’international. Tout cela au nom d’un monde imaginaire.
La France est très démunie quant au repérage de ces jeunes qui ont entre 18 et 35 ans et qui cherchent à rejoindre les djihadistes. La France pèche par une politique répressive, sans stratégie d’action préventive pour prémunir de la radicalisation religieuse, ce qui devrait constituer une priorité pour le CFCM. La France fait preuve de laxisme à l’égard des radicaux intégristes, dont Dounia Bouzar dit que ce qui les intéresse c’est de faire dire à l’islam ce qu’ils ont envie qu’il dise. Ils entrent dans le Coran comme dans une auberge espagnole, où l’on prend ce qu’on veut. Les intégristes sont rarement d’anciens pratiquants, ils se convertissent directement à l’intégrisme. Ce qui les caractérise c’est leur degré d’aliénation mentale. Les islamistes, ce sont en fait des analphabètes religieux, que seule intéresse l’action meurtrière.
En dépit de leur retard technique, militaire, économique en regard de l’Occident, celui-ci n’est pas leur modèle. Car, si le progrès de l’Occident est lié à la sécularisation, il est inconcevable pour ces gens de relativiser, ou pire : mettre Dieu à l’écart ! Au contraire, la “revivifiance” de la religion voulue par les fondamentalistes tente de conjurer la menace de sécularisation qui pourrait tenter certains musulmans.
Bien que les djihadistes tentent de justifier leurs exactions en les référant à Dieu, Dieu n’est jamais qu’un alibi. L’islamisme n’est pas une religion. C’est l’accaparement, l’appropriation d’une doctrine religieuse radicalisée, instrumentalisée, en vue d’imposer un système de gouvernance totalitaire.
Ne nous méprenons donc pas : le terroriste qui se qualifie de musulman —et qui dans le même temps disqualifie l’islam— ne trouve rien dans la croyance des musulmans qui justifie ses exactions.
Gérard LEROY, le 25 novembre 2015