Pour Élias Launay, que j'embrasse
Avec d’autres traditions religieuses, en particulier celles du judaïsme et de l’islam, le christianisme a conscience de sa responsabilité historique à l’égard de la famille humaine et du destin même de la planète Terre.
Il est évident qu’il ne suffit pas de défendre les droits de l’homme si on ne défend pas en même temps les droits de la terre. Le théologien allemand Jurgen Moltmann a même envisagé ce que pourrait être une justice écologique. L'homme, dans sa participation à la gestion du monde, a un allié : les sciences et les techniques, à considérer dans leur dimension d’humanisation potentielle. Car les pouvoirs de la science et de la technique sont tels que nous pouvons aussi détruire les équilibres qui assurent la permanence de la vie sur terre.
La question-clé pour l’avenir, c’est la nature de la maîtrise rationnelle de l’homme. Comment prévenir les effets pervers de ce que nous expérimentons aujourd’hui comme un progrès ? Comment faire en sorte que la terre soit encore habitable pour les générations qui nous suivent ? Il convient de rappeler ici le nouvel impératif catégorique mis en avant par Hans Jonas dans son livre Principe de responsabilité : « Agis de telle sorte que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur la terre. ». Il s’agit là de l’auto-limitation du pouvoir humain.
L’énigme de l’histoire future demeure entière. Mais nous n’avons pas besoin de connaître l’issue finale de l’aventure cosmique dans notre village planétaire pour essayer de donner un visage humain à l’histoire qui est la nôtre. Avec les juifs et les musulmans nous ressentons la nécessité d’une théologie de la création qui donne un fondement radical à notre confiance dans l’avenir, dans la vie, dans l’être.
En situation concrète, l’éthique c’est l’acte de penser l’homme comme co-partenaire d’un monde qui ne se fera pas sans lui, jamais sans son désir, sans ses aspirations et ses intérêts. Reconnaissons à l’homme sa vocation d’être un co-créateur avec Dieu en vue de rendre la terre habitable. La transformation de la nature et l’exploitation des ressources de la terre ne doivent pas conduire à une démesure prométhéenne. De même que Dieu s’est reposé le septième jour, les hommes et les femmes de demain doivent faire l’apprentissage d’une sagesse sabbatique, celle de la sobriété, du silence, de la louange et de l’émerveillement devant la beauté du monde créé.
Gérard LEROY, le 8 juin 2017