Vatican I définissait la foi comme "une vertu surnaturelle par laquelle Dieu illuminait nos intelligences, nous permettant de croire vraies les choses qu'il avait révélées non pas à cause de la vérité intrinsèque des choses perçues par la raison, mais à cause de l'autorité de Dieu même qui ne peut ni se tromper ni nous tromper." Avec Vatican I la foi est en quête des vérités qu'il faut croire pour atteindre le salut. L’enseignement religieux est alors la vulgarisation d'un enseignement du magistère.
Le Magistère avait alors pour tâche de formuler et de défendre les vérités qu'il faut croire pour être sauvé. Le Concile devait être doctrinal. Cette conception réduisait Jésus au rôle d'enseignant, de porte-parole, de messager intermédiaire.
Pour d'autres Pères, la vérité chrétienne était conçue comme étant de type opérationnel et existentiel. L'agir de l'Eglise doit être vrai. Il doit faire la Vérité qui sauve et qui fait vivre. Le Concile devait être pastoral.
Paul, à partir d'un problème de situation vécue, propose une réflexion théologique (cf. Corinthiens, cf. Actes des Apôtres). L'agir de l’Église se réfléchit, se conteste, pour devenir un agir plus vrai.
Quand s'ouvre l'époque patristique, les Pères sont en même temps des Evêques (ou des gens qui ont des responsabilités dans le Peuple chrétien), des théologiens et des spirituels. L'unité du doctrinal et du pastoral est maintenue.
Le Moyen-âge est responsable de la dissociation du ternaire théologique-spirituel-pastoral. La théologie quitte les évêchés pour se réfugier dans les universités. Elle devient une réalité scolaire (scolastique) qui se construit loin des lieux où l'Eglise vit et réfléchit sur sa vie. Conséquence : le clergé et les fidèles pataugent dans l'ignorance. La spiritualité se réfugie dans les monastères. On se contente de ce qui fait tourner l'institution. Ce résidu donne beaucoup plus matière à obéissance qu'à réflexion. Le prêtre est alors découpé en quatre morceaux, qu'on repère ainsi : l'homo scolasticus : le "théologien" et les objets de foi ; l’homo pietatis : qui excelle dans les exercices spirituels ; l’homo canonicus : féru de règlement ; et l’homo misericordiae : le pasteur.
Le Concile de Trente n'a été un Concile "pastoral" qu'au sens mineur, encourageant les prêtres à être de "bons prêtres", pratiquants les exercices spirituels, se mainenant fidèles aux devoirs d'administration des sacrements, orthodoxes d'un point de vue doctrinal (contre les protestants). Mais ce Concile n'a pas été "pastoral" au sens majeur, incapable de refaire l'unité entre les morceaux. Le manque d'ecclésiologie est la cause de cet échec, s'attachant à parler de l'Eucharistie, de l'Evêque, du prêtre, de la justification, sans parler de l'Eglise autrement que comme hiérarchie et institution.
Au milieu du 19e siècle, apparaît un renouveau théologique qui conduira à la théologie du Corps mystique et un renouveau liturgique, biblique et patristique. À l'Ecole de Tübingen, on commence à voir l'Eglise comme un vivant qui se développe dans le temps, comme une totalité et comme un organisme.
Au début du 20e siècle, commence une recherche pour réconcilier l'aspect objectif de la Foi et son application dans la vie des hommes. Il faudra attendre Vatican II pour entendre l'Eglise déclarer une vérité non dissociée de son agir. Elle doit investir dans la pastorale le souci du doctrinal car la pastorale est affaire de vérité. La réconciliation de la vérité de foi et de l'agir ecclésial, du magistère doctrinal et du magistère pastoral, s'annonce avec Vatican II.
gérard LEROY, le 13 mai 2018