Pour Sophie Guerlin, Hélène, Jean-Marc et Roland, en hommage amical
La spécificité du Liban c’est la nature confessionnelle de son système politique. La présidence de la république est dévolue à un chrétien maronite, doté de pouvoirs exécutifs. C’est lui qui nomme le premier ministre et les membres du cabinet après consultation. Quant au président du parlement celui-ci doit être issu de la communauté chiite, le poste de premier ministre étant réservé à un musulman sunnite.
Les sièges du Parlement sont divisés à part égale entre chrétiens et musulmans. Ces sièges sont subdivisés entre toutes les divisions confessionnelles parmi lesquelles il nous faut distinguer les chrétiens maronites, les grecs orthodoxes, les grecs catholiques, un protestant, les musulmans sunnites, les druzes, les chi’ites, divisés eux-mêmes en 4 groupes (les duodécimains qui attendent le retour du douzième imam (Medhi, † 873) ; les septimains ; les zaydites du Yemen, les Ismaélites.
La communauté maronite a été la communauté religieuse la plus influente jusque dans les années 1970, ce qui lui favorisait un poids économique important jusqu'à ce que la guerre civile éclate en 1975. L’accord de Taëf signé le 22 octobre 1989 marque la fin de la guerre civile et institue le fonctionnement du système confessionnel actuel.
Les accords de Taëf ont permis un compromis sur le plan de la représentation politique. Ils ont fixé le nombre de députés à 128, porté par un récent projet incluant de nouveaux membres de confessions chi’ite, sunnite et druze à 134. Le parlement compte 64 députés chrétiens et 64 musulmans. Sunnites et chiites, sont représentés en nombre égal (27 députés) Les députés maronites sont au nombre de 34. Cependant les intérêts particuliers, les rivalités entre les groupes et les personnes continuent de générer le népotisme et la corruption.
Ces chiffres montrent la complexité du système confessionnel et des jeux d’alliance qui font la politique de ce pays.
Le système actuel a été conçu pour assurer une bonne représentation des minorités, à la fois localement mais aussi au niveau national. Il s’agit notamment de préserver les intérêts des chrétiens, qui font la spécificité du Liban dans le Moyen-Orient à majorité musulmane.
Les chrétiens du Liban représentent un peu moins de la moitié de la population de ce pays. Les estimations donnent un chiffre autour de 40 % de chrétiens, soit le pourcentage le plus élevé de tous les pays du Proche et du Moyen-Orient. Néanmoins, ce taux ne cesse de baisser depuis plusieurs années.
Cette nouvelle réforme suscite bien des critiques et des inquiétudes dans un pays marqué par une situation sécuritaire fortement instable. Les druzes, qui ont obtenu un siège supplémentaire suite à la réforme, voient leur pouvoir de décision diminuer dans les votes à la majorité simple. Mais leur coalition persistante avec les sunnites favorise leur capacité de négociation en dépit de la faiblesse de leur pouvoir réel. Par ailleurs, les arméniens orthodoxes, dont le nombre de sièges n’est pas modifié, voient leur pouvoir de vote augmenter.
Ce patchwork confessionnel est décidément un obstacle à la gouvernance.
Gérard Leroy, le 19 octobre 2024