Pour Samuel Mourier en hommage amical

   Un mouvement national forgé au XIXe s. d'une partie du peuple juif en Europe centrale a été créé par Theodor Herzl, journaliste viennois, convaincu que l’assimilation n’est pas la bonne solution. Ce mouvement visait à l'autodétermination du peuple juif en un territoire correspondant à la région de Palestine. Il est rejoint à la suite des pogroms de 1881 commis contre les Juifs en Russie par un courant emmené par l’écrivain politique Moïse Lilienblum.

Le terme « sionisme » fait référence au « retour à Sion », Sion étant synonyme de Jérusalem, et par extension à la terre d’Israël, voire au peuple juif. Le mouvement sioniste moderne a été ravivé par l'affaire Dreyfus.

Le souvenir de la pratique religieuse du peuple juif en exil cultive et exacerbe la volonté d’un retour  à Jérusalem (Sion), aux pays de « nos pères ». Le rêve d'une renaissance de la patrie juive à des fins messianiques nourrit le devoir d’habiter la terre d’Israël. Le titre du quotidien israélien est d’ailleurs Ha’aretz (la terre).

Le 1er Congrès sioniste à Bâle en 1897, propose « la création pour le peule juif d’un foyer national juridiquement garanti en Palestine. » En 1917 Arthur Balfour, secrétaire d'État britannique aux Affaires étrangères adresse une courte lettre au baron de Rothschild qui entraîne le Royaume-Uni à se déclarer en faveur de l'établissement en Palestine d'un projet national. C’est la première étape en vue de la création de l'État d’Israël.

On assiste alors à l’éclosion de mouvements contre l’assimilation totale. Le peuple, pense-t-on,  ne peut être aidé que par lui-même ; le territoire ne peut être que la terre historique des juifs, la Palestine. Des groupes se forment dans ce sens dans certaines villes de Russie, comme les « Amants de Sion » qui encourageaient l’immigration en Palestine et la colonisation. Les aspirations nationales se multiplient tandis que se développe la sécularisation de la population ashkénaze. Le mouvement sioniste gagne en popularité et sera porté par vingt-deux congrès sionistes jusqu’en 1945. Le 29 novembre 1947 l’ONU prévoit la création d’un État juif entraînant la séparation d’Israël et des Palestiniens sur le territoire, plaçant Jérusalem sous contrôle international.

L’idée sioniste n’est pas accueillie avec enthousiasme par l‘ensemble du judaïsme. Les adeptes de l’assimilation la considéraient en effet comme anachronique. D’autres considéraient que le retour du peuple juif sur sa terre ne peut être qu’un événement eschatologique des temps messianiques.

D’autres se heurtaient au caractère laïc du programme sioniste, à l’écart de la loi religieuse. Ces oppositions ont disparu, hormis dans les milieux ultra-orthodoxes.

Le Sionisme met l‘accent sur ses principes intégrateurs comme la langue, l’art, la religion, les symboles et les principaux réflexes culturels qui font un peuple et son territoire propre. Le mouvement nationaliste continue de soutenir l'État juif et accueille de nouveaux immigrants.

D’autres sionismes se sont distingués, comme le sionisme culturel du penseur nationaliste Ahad Ha’Am (†1927) auquel s’est lié Chaim Weizmann, 1er président de l’État d’Israël, président de l’Organisation sioniste mondiale.

    Un sionisme dit « travailliste » insiste sur l’impossibilité de création d’un État juif sans la colonisation juive de la classe ouvrière en Palestine.  Sa grande figure fut Ben Gourion.

Un sionisme révolutionnaire religieux a fondé « l’Organisation terroriste », qui inspira le retour en Judée et en Samarie.  

Il y eut même, il y a encore, un sionisme chrétien qui justifie la création de l'État d'Israël en 1948 par les prophéties bibliques. C’est le cas des évangéliques qui considèrent que le retour de Jésus sur terre enfin reconnu comme Messie assurera le triomphe de Dieu sur les forces du mal, pendant que le peuple juif se convertira au christianisme. Ce mouvement, est devenu une composante de la droite évangélique aux États-Unis.

La question : Est-il « naturellement » légitime que l’homme aspire à vivre au cœur d’un groupe humain rassemblé sur un lopin de terre, partageant les mêmes réflexes culturels, la langue, les symboles, les rites et les mythes, les confessions religieuses exprimées ? À observer les aspirations des Rohingyas, des Ouïghours, des Kurdes, ne conviendrait-il pas de favoriser l’établissement et le maintien d’une culture dans un territoire qui l’identifie, pour elle-même et aux yeux de monde ?

Gérard Leroy, le 24 mai 2024