Éthique n’est pas morale

Pour Aline Laborit, en hommage amical

   L’on s’accorde, dans le sillage de Paul Ricœur, à établir une distinction entre morale et éthique, entre la région de la loi et de la norme, et celle du dynamisme ou du sens qui anime le procès d’humanisation à l’œuvre dans l’agir humain. Cette distinction entre éthique et morale libère de l’enfermement des contraintes du devoir, et de ne devoir faire que ce qu’on a bien le droit de faire !

Il faut noter qu’on se situe entre deux perspectives, celle de Ricœur qui définit l’éthique comme la visée d’une vie bonne, avec et pour les autres dans des institutions justes, et celle d’Emmanuel Lévinas qui identifie la responsabilité originaire avec la relation au Visage d’Autrui. « Chaque visage, écrit Lévinas, est l’Horeb d’où procède la voix qui interdit le meurtre. » Dans les deux cas il faut passer par l’épreuve de la norme et de ses déterminations objectives, avec leurs contraintes, remarquait René Simon.

Cette distinction invite à la dynamique autonome, et marque la complémentarité entre deux héritages : l’héritage kantien, où la morale est définie par le caractère d'obligation de la loi, ce qui donne à la morale sa caractéristique obligatoire, marquée par des règles, des obligations, des interdictions. Ainsi la morale est-elle caractérisée par deux choses à la fois : elle doit pouvoir s'adresser à tout le monde, c'est son exigence d'universalité, et tout le monde ne peut pas faire n'importe quoi, c'est sa caractéristique d'effet de contrainte.

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