Sauve-toi, la vie t’appelle (1)

Pour mon ami Gérard LÉVY, avec ma reconnaissance

   Boris Cyrulnik est désormais bien connu du grand public. À la fois spécialiste de neurologie et psychiatre, il s’est révélé au grand public par ses théories sur la résilience, comme faculté de rebondir sur le malheur, processus qui permet et stimule un bon développement après un traumatisme, sans retour à l’état initial.

 

Dans son dernier ouvrage paru en 2012 chez Odile Jacob, Sauve-toi, la vie t’appelle, le Pr Cyrulnik nous convie à une étude de cas en retenant de sa propre enfance les moments forts qu’il nous décrit. 

 

L’ouvrage commence par le récit émouvant des souffrances, des blessures de ce petit bonhomme condamné à mort pour le seul crime d’être né juif, privé de ses parents —sans même avoir pu leur dire adieu—, arrêté, évadé, traqué, et pour finir sauvé. 

 

C’est cette période de l’enfance qui constitue le sujet d’étude pour notre auteur. C’est alors qu’il découvre, et nous en témoigne, la complexité des profondeurs, les tromperies de la mémoire qui tend à évacuer, notamment quand elle a été exposée à l’insoutenable, la réalité historique des faits pour transformer les souvenirs. 

Il est une période que l’auteur éprouve quelque difficulté à restituer, c’est le temps qui vient immédiatement après la guerre.  

Sa réflexion porte aussi sur la difficulté de parler à ceux qui n’entendent rien parce qu’ils ne veulent rien entendre. Il décèle de la violence dans l’indifférence. Ce qui rend d’autant plus fort l’attachement aux personnes que sa vie a croisées à l’instant crucial et qui l’ont sauvé, lui, l’innocent enfant de six ans que deux hommes étaient venus chercher pour le mettre à mort. 

Si l’étude est l’étude de son cas, singulier, Boris Cyrulnik a cependant voulu l’ouvrir à d’autres qui, dans des circonstances différentes, ont eu à vivre une rencontre avec le trauma. 

Ainsi nous permet-il de comprendre l’émotivité excessive dont on a quelquefois grand peine à se débarrasser. En résumé, deux conditions concomitantes fondent la fragilité des émotifs : l’environnement “peu secure” de l’enfant, et la non-verbalisation de cet enfant. Cela est notamment vrai pour ceux dont la tendre enfance s’est déroulée sous les raids de bombardiers que les sirènes d’alerte annonçaient à grand bruit. Quant à la verbalisation, les enfants nés au beau milieu du XXe siècle se sont longtemps souvenu d’avoir été maintes fois réprimandés lorsque, à table, ils osaient émettre un avis. “Les enfants ne parlent pas à table !” C’était bien connu.

 

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